Rencontre avec les auteurs
Sans quitter son fauteuil, la marquise apostropha lassemblée :
- Que faisons-nous de ce jeune homme inconscient qui a commis lirréparable !
Cyrano impertinent ne put sempêcher de répliquer :
- Irréparable ! Irréparable ! Cest cela que vous dites ?
- Loin de moi la volonté de la critique,
mais la disparition de vos épîtres
nest pas à mon goût une perte sinistre !
Victor Hugo, plus posé que les autres sinterposa et calma la dispute. Il venait dapercevoir Camille et trouva fort à son goût son joli minois.
- Etes -vous vous aussi pyromane ? demanda t-il avec un petit sourire malicieux.
Sous leffet de la surprise, Camille recula de quelques pas. Le grand Victor Hugo en personne lui adressait la parole.
Malgré lémotion qui lui nouait la gorge, elle bégaya :
- Heu Non, jai une peur bleue du feu...
- De toute façon, elle nétait pas là lors de lincendie, expliqua Hadrien, elle
Madame de Sévigné lui coupa la parole. Il comprit quil venait de commettre une maladresse.
- Alors expliquez-moi pourquoi et comment elle est ici ? dit-elle en regardant Camille dédaigneusement. Puis elle ajouta.
- Ma chère votre toilette est de fort mauvais goût !
Voltaire qui de son temps avait toujours défendu les victimes de lintolérance, prit la parole :
- Exprimez-vous sans crainte, nous sommes tout ouïe.
Camille se tourna vers Voltaire et lui avoua dun air ennuyé :
- Il faut que je vous dise la vérité je viens dune autre époque, de votre futur en quelque sorte.
Madame de Sévigné, que rien ne semblait démonter, la poussa dans ses retranchements :
- Avez-vous des preuves qui étayent de telles affirmations, jeune fille ?
Camille paniqua un instant. Puis, se jetant à leau, elle se tourna vers Victor Hugo :
- Savez-vous que de lécole primaire à la faculté on apprend vos textes, quils sont traduits dans toutes les langues ? Que lon a fait un film sur votre fille Adèle avec une actrice connue dans le monde entier ? - Là, elle était sûre de toucher la corde sensible
Victor Hugo resta un instant interdit. Puis le naturel reprit le dessus et il demanda :
- Et au sujet de mon enterrement quen a t-il été ?
Elle ne se démonta pas et répliqua :
- Ce que je sais, cest que vous aviez demandé le corbillard des pauvres et vous avez eu un enterrement de chef détat. Vous reposez au Panthéon, avec les plus illustres hommes qui ont marqué lhistoire de France.
Madame de Sévigné sinterposa :
- Qui nous dit que tout ceci est vrai ? Et quand bien même ! Si vous êtes aussi célèbre que cette jeune fille le dit - elle était un rien sceptique - cela na vraiment rien dextraordinaire !
Camille sentit la moutarde lui monter au nez. Le cerveau en alerte elle chercha ce qui pourrait clouer le bec à cette péronnelle. Ca y est ! Elle avait un argument et qui était dordre confidentiel !
- Jai une preuve irréfutable !
Hugo, amusé, passa la main dans sa barbe. En un quart de seconde, Camille essaya de se souvenir de ce cours de français où son prof leur avait lu la très belle lettre dun auteur de théâtre qui avait assisté à lagonie de lécrivain et raconté son enterrement. Elle regarda Hugo dans les yeux et dit :
- Alfred Gassier, vous vous souvenez de ce jeune étudiant de dix sept ans qui vous écrivit lors de votre exil ?