Le carnet dHadrien
Après sêtre inscrite sur la fiche de présence, Camille se dirigea vers Madame Martin, la documentaliste :
- Bonjour. Tu es en Seconde 9 nest ce pas ? Tu viens faire des recherches ?
Camille comprit que la documentaliste attendait delle une réponse sérieuse, elle répondit :
- Mon prof de français menvoie faire des recherches pour le roman. Je peux aller en salle informatique, sur Internet ?
Cest en général la première question que pose un élève moyen dans lespoir de trouver sur un des ordinateurs quelque chose à imprimer histoire davoir une bonne note, sans trop se fatiguer ! Voire, il faut bien lavouer, essayer de passer une heure à converser avec un amateur de foot, pire jouer à la bataille navale ! Mais cest sans compter sur la perspicacité des documentalistes qui ont su faire de ce lieu un espace magique qui enthousiasme les élèves. Elles y font régner une telle atmosphère de travail, tout en gardant un esprit sympathique, il est impossible de ne rien leur demander pendant une recherche.
Avec un sourire désarmant, Madame Martin lui répondit :
- Je me doutais bien que vous auriez besoin darchives, jai préparé toute une caisse à votre disposition.
Elle linstalla Camille dans un coin en compagnie de liasses de papiers jaunis, avec une odeur dun autre temps. Elle était bien avancée ! Il lui restait trois quarts dheure, elle n'allait tout de même pas les passer à se lamenter, elle ouvrit donc à contrecur le premier dossier comportant des cartes postales, des photos anciennes, des lettres de collégiens à leurs parents mais bien vite elle se prit au jeu et les avala les uns après les autres dune seule traite. Certains textes lui donnaient tantôt envie de rire, tantôt la rendaient plus mélancolique. La vie à cette époque était bien difficile par moments. Pendant ses recherches, Madame Martin lobservait dun air malicieux et satisfait : lhistoire pouvait se lire comme un roman, il suffisait dune étincelle !
Linterclasse sonna. Camille se précipita pour ranger ses documents, ils lui échappèrent et séparpillèrent sur le sol. Un peu gênée, elle commença à les rassembler lorsquun carnet vert lui sauta aux yeux. Elle ne lavait pas encore vu, perdu au milieu des vieux dossiers. Cétait le cahier intime dun élève de Saint-Joseph. Il portait le nom dHadrien Teyssier et était daté de lannée dix huit cent cinquante et un. Elle feuilleta les pages noircies à la plume. Elle neut que le temps de lire la dédicace tracée dune écriture sage et appliquée sur la couverture intérieure :
Il restait un point important à éclaircir : le carnet sarrêtait brusquement à la date du onze janvier mille huit cent cinquante et un par ces mots :
" Ce matin, jai découvert par hasard lexistence dune pièce que lon nomme ici lEnfer. Je vais essayer dy pénétrer. Si je ne devais pas revenir, ami inconnu qui liras ces lignes, si tu as quelques affinités avec moi, pars à ma recherche. "
Hadrien